Nicolas Flamel, un parisien alchimiste ?

1345 (environ) - 1418

 

La stèle funéraire de Nicolas Flamel, pierre calcaire de 85 par 44 cm de côté, est conservée au musée de Cluny à Paris.

 

cliquer sur la photo pour une vue complète de la pierre tombale

Nicolas Flamel, haut de la plaque funéraire

Nicolas Flamel, partie haute de sa pierre tombale

 


Nicolas Flamel serait alchimiste. Ainsi est-il passé à la postérité dans la mémoire des parisiens. Cette postérité est si populaire que Nicolas Flamel se retrouve aujourd'hui dans la saga des Harry Potter.

Nicolas Flamel, qui est-il vraiment ?

Nicolas Flamel, de profession, est un homme de lettres. Il tient un atelier d'écriture adossé à l'église Saint Jacques de la Boucherie (actuellement la tour Saint Jacques, à Paris). Cet atelier permet aux illettrés de faire rédiger des missives. Il permet aussi de fabriquer des livres, avec certainement la possibilité de faire peindre des enluminures (petites ou grandes figures peintes sur le parchemin), pour les commanditaires les plus aisés. L'imprimerie n'existe pas encore. L'accés à l'écrit est rare et difficile. La bourgeoisie et la noblesse restent massivement illettrées.

Nicolas Flamel passe pour être écrivain public, voire copiste. Né à Pontoise, sa date de naissance est inconnue, indiquant un rang social faible. Elle peut être raisonnablement fixée vers la décennie 1340. Il décède en mars 1418. Né humble, la date de son décès connue indique une notoriété acquise.

Si plusieurs manuscrits alchimiques, conservés à la Bibliothèque Nationale, lui sont attribués à tort ou à raison, un élément matériel prouve l'importance acquise par Nicolas Flamel de son vivant : l'existence de son testament sur parchemin et sa sauvegarde étonnante.

Le testament de Nicolas Flamel est miraculeusement parvenu jusqu'à nous. Il est conservé dans la bibliothèque royale au cours des siècles, puis à la Bibliothèque Nationale. Il se trouve au département des Manuscrits sous la côte Manuscrit Latin 9164, testament de Nicolas Flamel 22 novembre 1416, copie de 1421. Ce testament se présente en quelques folios, aux larges dimensions, 38 par 27 cm.


Testament de Nicolas Flamel

Nicolas Flamel son testament manuscrit

Testament de Nicolas Flamel, rédigé sur parchemin, copie de 1421. Extrait, BNF Gallica



Ce testament, quelques centaines d'années après, est transcrit en français. Il devient presque lisible pour nous. Ce document, accessible sur la Gallica, se trouve dans un recueil de pièces diverses du XVIIe et XVIIIe siècle. Hormis la page d'en-tête protocolaire en latin, les suivantes sont en français. Sa lecture,  rébarbative et monotone, nous apprend que Nicolas Flamel prodigue des dons à différentes églises pour célébrer des messes selon des critères précis de cérémonie.


Nicolas Flamel Testament transcription

Testament de Nicolas Flamel, transcription en latin puis français, XVIIe siècle. Extrait, BNF Gallica



(page en cours de réécriture 2017-05-08)




Plusieurs manuscrits alchimiques lui sont attribués. Ils sont conservés à la Bibliothèque Nationale, sous les références fr.19075 et fr.14765 et à la Bibliothèque de l'Arsenal, références n° 2518 et n° 3047. (1)



Tournons nous maintenant vers la pierre tombale de Nicolas Flamel.

Trois personnages en buste apparaissent dans la fenêtre, en haut de l'inscription. Ils sont couronnés d'une auréole.

Au centre le personnage tient de sa main gauche le globe crucifère, symbole de notre monde et en notation spagyrique l'antimoine. De sa main droite il bénit. Sa tête se tient entre les deux luminaires, le soleil et la lune. Il s'agit de Dieu, du Créateur. La croix du globe crucifère touche la lune.

A sa droite l'homme porte une clef, l'identifiant à Saint Pierre. A sa gauche l'homme portant l'épée est Saint Jacques. Cette représentation de Saint Jacques nous rappelle que la stèle funéraire se trouvait, à l'origine, dans l'église de Saint Jacques la Boucherie où fut enterré Nicolas Flamel. Saint Jacques est considéré comme le successeur chrétien de l'Hermès grec, le Mercure des latins. Cette résonance ici n'étonne pas.

Des symbolistes voient ici une clé qui permettrait de trancher le noeud gordien du Grand Oeuvre.

 

 

Flamel.jpg (8803 octets)

 

Il écrit :" ... encore que moi, Nicolas Flamel, écrivain et habitant de Paris, en cette année 1399 et demeurant en ma maison en la rue des Ecrivains, près la chapelle Saint-Jacques de la boucherie...".

Nicolas Flamel affirme avoir achevé le Grand Oeuvre et obtenu la Pierre Philosophale, au pouvoir transmutatoire : " ...donc la première fois que je fis la Projection, ce fut sur du mercure, dont j'en convertis une demi-livre ou environ en pur argent, meilleur que celui de la minière comme j'ai essayé et fait essayer par plusieurs fois. Ce fut le 17 janvier, un lundi environ midi, en ma maison, en  présence de Perrenelle (son épouse) seule, l'an 1382 ... Je la fis (ensuite) avec la pierre rouge, sur semblable quantité de mercure, en  présence encore de Perrenelle seule, en la même maison, le 25 avril suivant de la même année, sur les cinq heures du soir..." (1)

Il précise : "Lorsque j'écrivais ce commentaire, en l'an 1413, sur la fin de l'an, après le trépas de ma fidèle compagne... elle et moi avions déja fondé et renté quatorze hopitaux en cette ville de Paris, bâti à neuf trois chapelles... (et donné de) bonnes rentes à sept églises avec plusieurs réparations en leurs cimetières..."

(1) Nicolas Flamel, "le livre des figures hiéroglyphiques" in éditions Retz, 1977, pages 229, 73, 86.

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A la différence de Fulcanelli, pseudonyme d'un alchimiste parisien du début du XXème siècle,  maintenant identifié à Paul Decoeur, Nicolas Flamel est un personnage bien réel.

L'Encycopédie Universalis résume ainsi sa vie, son oeuvre et sa légende : "Personnage dont s’empara très tôt la légende, faisant de lui un grand alchimiste. Né près de Pontoise, Nicolas Flamel vint travailler à Paris, tout près de l’église Saint-Jacques-la-Boucherie, comme écrivain public, profession d’autant plus lucrative que l’imprimerie n’était pas encore inventée.

Il aurait fait, dans sa jeunesse, un rêve étrange au cours duquel un ange lui montrait un livre extraordinaire. Il aurait ensuite découvert dans la réalité cet ouvrage, de trois fois sept feuillets, contenant des gravures et des textes alchimiques et signé «Abraham le Juif». Nicolas Flamel épousa ensuite dame Pernelle, compagne non seulement de sa vie mais aussi de ses recherches hermétiques ; les deux époux représentent sans doute le plus célèbre couple d’alchimistes en Occident.

Pendant des années, ils essaient de déchiffrer le précieux volume ; comme ils n’y parviennent pas, Nicolas Flamel décide de faire le pèlerinage de Saint Jacques de Compostelle, où il rencontre un certain maître Canches, savant juif converti qui lui fournit des clefs d’interprétation. Dès lors, toujours selon la légende, la fortune de Nicolas Flamel serait, grâce à l’alchimie, devenue énorme : outre la création de nombreuses fondations charitables, on lui attribue la reconstruction de l’église Saint Jacques la Boucherie - dont il reste l’actuelle tour Saint Jacques - et l’édification de deux "arcades" symboliques au charnier des Innocents, également à Paris."

 

 

Photo de la tour Saint Jacques prise de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Au pied de cette tour, construite seulement au XVIe siècle, se trouvait l'église "Saint-Jacques-la-boucherie". L'échope de copiste et d'enlumineur de Nicolas Flamel était installée contre cette église dont il ne reste rien aujourd'hui.

 

Nicolas Flamel et la tour Saint Jacques

La tour Saint-Jacques.

Cliquer sur la photo pour une vue élargie et quelques commentaires. Au premier plan, à droite : le mystérieux corbeau voilé, chimère posée sur la rambarde de la tour nord de la cathédrale Notre-Dame de Paris lors des restaurations conduites au XIXème siècle par Viollet le Duc.

 

Citation :" La pierre philosophale l’aurait rendu immortel. Mais on sait, de source sûre, que Nicolas Flamel mourut le 22 mars 1418, à Paris... Une de ses maisons se trouve encore, rue de Montmorency, à Paris également. La rue de son domicile principal porte son nom ; une rue voisine s’appelle Pernelle.

 

Rue Pernelle Flamel

 

Citation : "Les textes attribués à cet hermétiste "Le Livre des figures hiéroglyphiques" , 1409, (édition critique par R. Alleau, Paris, 1970) et la partie légendaire de sa vie doivent sans doute être interprétés dans un sens symbolique renvoyant à la signification profonde de toute alchimie traditionnelle. Par exemple, le voyage à Saint-Jacques de Compostelle lui-même n’aurait pas eu lieu mais signifierait l’une des étapes de la réalisation "philosophale". Fin de citation de l'Encyclopédie Universalis.

 

Flamel.jpg (8803 octets)

 

 

Pour accroître notre interrogation il faut noter que le symbole de la terre des alchimistes, le globe surmonté de la croix, est figuré par la disposition même de la tour et des rues Flamel et Pernelle. Sur le plan de la ville de Paris la tour saint-Jacques est figurée par un cercle. De ce cercle part vers le haut la rue Flamel, elle même coupée transversalement par la rue Pernelle. Nous avons bien là le globe crucifère.

 

Fulcanelli indique que le fameux "Livre des figures hiéroglyphiques" dont parle Nicolas Flamel dans son manuscrit a été "pastiché", fabriqué aprés-coup, d'après sa description. Quelques exemplaires manuscrits sont  ainsi fabriqués au XVIIème ou XVIIIème siècle, suite aux descriptions données par Flamel dans son manuscrit, puis imprimés en tant que "livres" en 1612.

Dans le lien ci-dessous une vidéo, en deux morceaux, montre un exemplaire d'un de ces livres ayant appartenu à Schwaller de Lubicz. Cet égyptologue alchimiste, né en 1887, le tenait dans sa bibliothèque de Suhalia, en Suisse, aux alentours des années 1922/30 et l'a gardé jusqu'à son décès en 1961 à Plan de Grasse, en France. Le couple Schwaller de Lubicz, Aor et Isha, ont aussi le trés rare privilège d'avoir reçu de Fulcanelli (auquel ce site est dédié, voir ici la page qui lui est consacrée) son livre dédicacé de sa main, "Le Mystère des cathédrales".

cliquer sur le lien

Livre des figures hiéroglyphiques1 (vidéo de 12') Livre des figures hiéroglyphiques 2 (vidéo de 10')
Nicolas Flamel livre des figures hiéroglyphiques Nicolas Flamel, livre des figures hiéroglyphiques

 

Fulcanelli précise, dans son livre "Les Demeures Philosophales" : "... On voit parfois, il est vrai, de loin en loin, passer dans le commerce de soi-disant copies du Livre d’Abraham ; celles-ci, en très petit nombre, ne présentent aucun rapport les unes avec les autres, et se trouvent réparties dans quelques bibliothèques privées.

Celles que nous connaissons ne sont que des essais de reconstitution d’après Nicolas Flamel. Dans toutes, on retrouve le titre, en français, très exactement reproduit et conforme à la traduction des Figures Hierogliphiques, mais il sert d’enseigne à des versions si diverses, si éloignées surtout des principes hermétiques, qu’elles révèlent ipso facto leur origine sophistique.

Or, Nicolas Flamel exalte précisément la clarté du texte, " escript en beau et tres-intelligible latin ", au point qu’il en prend acte pour refuser d’en transmettre le moindre extrait à la postérité. En conséquence, il ne peut exister de corrélation, et pour cause, entre l’original prétendu et les copies apocryphes que nous signalons.

Quant aux images qui auraient illustré l’ouvrage en question, elles ont aussi été faites d’après la description de Nicolas Flamel. Dessinées et peintes au XVII e siècle, elles font actuellement partie du fonds alchimique français de la bibliothèque de l’Arsenal .

En résumé, tant pour le texte que pour les figures, on s’est seulement contenté de respecter, dans ces tentatives de reconstitution, le peu qu’en a laissé Nicolas Flamel ; tout le reste est pure invention. Enfin, comme jamais nul bibliographe n’a pu découvrir l’original (le fameux livre comportant les figures hiéroglyphiques), et que l’on se trouve dans l’impossibilité matérielle de collationner la relation de l’Adepte, force nous est de conclure qu’il s’agit bien là d’une œuvre inexistante et supposée...." Fin de citation de Fulcanelli.

 

Flamel.jpg (8803 octets)

 

Nicolas Flamel et son épouse Dame Pernelle ont donc vraiment existé. Ce ne sont pas des personnages de légende.

Au XVIIIème siècle le curé de la paisible paroisse Saint-Jacques-la-Boucherie, l'abbé Villain, semble gêné par l'ombre sulfureuse projetée post-mortem par Nicolas Flamel et Dame Pernelle (ou Perrenelle). Il veut démontrer que Nicolas Flamel et Dame Pernelle ne doivent rien de leur richesse à la soit-disante Pierre Philosophale. Il collationne alors tous les actes notariés, registres, documents dûment authentifiés parvenus jusqu'à son époque et rédige un ouvrage consacré à ses anciens paroissiens, intitulé "Histoire critique de Nicolas Flamel et de Pernelle sa femme, recueillie d'actes anciens qui justifient l'origine et la médiocrité de leur fortune contre les imputations des alchimistes... Paris, G. desprez, 1761". Par son travail nous pouvons mesurer l'étendue de leurs biens.

Aujourd'hui subsiste à Paris une hostellerie bâtie par Nicolas Flamel, en 1407. Celle-ci, située au 51 rue de Montmorency, était mise à la disposition des nécessiteux de son temps.

 

Nicolas Flamel hostellerie rue de Montmorency

cliquer sur la photo pour aller à la page consacrée à cet hostellerie

 

Nicolas Flamel, photo de la partie basse de sa plaque funéraire

Nicolas Flamel, bas de la plaque funéraire

 

Un décharné est allongé, et non un squelette. Des morceaux de chair sont visibles. Il nous parle : "De terre suis venu et en terre retourne".

 

 

 

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