Les symboles de Mary Shillito au château des Avenières

 

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Grand salon sud, aujourd'hui salle de restaurant, du château des Avenières.

 

Les pièces du rez de chaussée sont immenses. Ce sont des salons de réception. Le papier-peint qui décore les murs montre des arabesques de roses, à la façon des tympans de nos cathédrales. S'accrochant aux rinceaux des couronnes dorées portent un cygne blanc tenant en son bec un fer à cheval. Un phylactère posé non loin et se répétant à l'envie, porte la devise "Sperandum est", "Il convient d'espérer". Nous trouvons là la devise de la famille Wallace Shillito avec son blason, le cygne au fer à cheval, que nous avions déja découvert sur le dallage du couloir de l'entrée.

 

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Détail du papier peint mural du Grand salon, aux blason des Shillito. Pourra-t-on un jour commander ainsi notre papier-peint à Castorama ? Quel luxe.

 

Cette vue est une partie du mur du grand salon, avec une poutre apparente. Cette salle est presque entièrement recouverte de ce papier-peint fait sur mesure. Le "Sperandum est" appartient à la famille Wallace Shillito et le "M" renvoie à Mary, comme le dallage de l'entrée, du vestibule, que nous avons vu précédemment. Un flot de lumière rentre par les grandes fenêtres de la pièce, aujourd'hui salle de restaurant.

 

Au sol également le blason des Shillito se répète jusqu'à l'obsession, sans discrétion ni retenue. Des bandes longitudinales de losanges entrecoupent les cygnes des Shillito, toutes les sept rangées. A leur intersection le M de Mary s'intercale. Ainsi nous savons qui est la propriétaire.

 

Chateau des Avenières, dallage du grand salon au blason des Shillito

Dallage du grand salon, château des Avenières

 

Les grandes pièces intérieures ont des cheminées en pierre calcaire monumentales, provenant peut-être de Bourgogne. Le manteau de la cheminée de la salle sud montre un écu maintenu par deux femmes nues portant phylactère à devise latine. Un heaume argenté à la visière dorée, coiffé d'un bouquet de feuilles dorées, est posé sur l'écu. De ce bouquet sort une queue écailleuse, queue de poisson, terminée par une tête d'homme barbu couronné.

 

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L'immense cheminée en calcaire du grand salon sud

 

Arrêtons nous sur plusieurs détails. Les deux femmes nues, aux cheveux déliés, portent des phylactères où se lit : "Flamma dorant" et "Cineres manent".

 

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Les femmes au phylactère, cheminée de la salle à manger du château des Avenières

 

Rien d'étonnant à retrouver ici deux jeunes femmes, telles des muses, dans le plus simple appareil. N'oublions pas que nous sommes là dans un château de femmes, l'américaine Mary Shillito et la bourguignonne Marcelle Senard, amies de la poétesse lesbienne américaine Nataly Clifford Barney qui tient ses salons littéraires rue Jacob à Paris et qui ont la même préférence.

Les phylactères signifient : "Les flammes brillent" et "Les cendres restent". Le sens littéral se suffit à lui-même pour une cheminée où brillent les flammes et ne restent que des cendres. Cependant un sens second, analogique, est plus pertinent. Retenons que si la mort d'une personne se termine en un corps de cendre, son esprit peut rester et briller comme une flamme. Ultime espoir d'une jeunesse dorée qui craint par dessus tout le viellissement du corps et de l'esprit.

 

De part et d'autre de la cheminée, deux portes ouvrent sur les communs. Etonnantes portes.

 

Cliquer sur les photos pour une vue agrandie

Chateau des Avenières, porte à tête de buffleChateau des Avenières, porte à tête de lion

 

Portes à tête de lion et de buffle

 

Ces portes prouvent, s'il en est besoin, que nous ne sommes pas dans une demeure ancienne. A gauche la tête de taureau est-elle plutôt une tête de buffle, voire de bison ? Les grandes prairies du Middle West américain et ses troupeaux immenses ne sont pas loin. Pourquoi cette tête ici ? De même, à droite, une tête de lion au visage soucieux orne le panneau central de  la porte. Quel sens donner à ces deux têtes, seules du genre au château des Avenières ? La sculpture est parfaite, mais nous sommes loin de l'héraldisme. Le style est résolument figuratif, voire anatomique. Ces deux têtes surprennent par leur côté kitsch, faisant même déplacées ici, à défaut de pouvoir comprendre leur sens. Faut-il voir des jeux de mots - américains - dans ces deux têtes animales ? Si un lecteur averti a quelque idée, merci d'en faire part.

Les deux linteaux de pierre des portes sont, par contre, d'une exquise finesse. A gauche six feuilles de lierre et leurs fruits se développent en arabesque, au bout de laquelle un monstre-serpentin s'enroule pour mordre le bout de la cheminée. A droite cinq feuilles de vigne et leurs grappes servent de nourriture à deux escargots qui s'affairent à leur festin. Les escargots signent là la paternité de tailleurs de pierre bourguignons. La menuiserie en chêne est de qualité. La partie inférieure des portes reprend la draperie néogothique des panneaux de chêne protègeant le bas des murs.

 

A droite de la porte au lion Mary Shillito recouvre le mur adjacent d'une grande tapisserie médiévale. Cette tapisserie réalisée vers 1500 montre les derniers épisodes de la vie de Jésus, son arrestation et sa crucifixion. Ce cliché provient du catalogue de la mise en vente publique des biens du château, en 1936, lorsque Mary Shillito se retire des Avenières pour aller finir sa vie en Suisse, vers Salagnon. Ce catalogue permet de se faire une idée précise des meubles et objets du château des Avenières, certains étant décrits avec minutie.

 

Chateau des Avenières, tapisserie de la crucifixion du Christ

Tapisserie ornant le mur intérieur de la salle à manger du château des Avenières.

La présence de cette scène religieuse témoigne sans doute de la foi de Mary Shillito. Cette tapisserie de quatre mètres sur trois loge difficilement dans l'espace mural qui lui échoit. Ainsi à droite le bras du Christ se heurte à la poutre du plafond. Ce n'est pas un problème pour Mary Shillito qui, en américaine pragmatique, fait couper la tapisserie du temps de Louis XII pour contourner l'obstacle. Le morceau de plafond visible sur la photo prouve indubitablement la présence cette tapisserie aux Avenières

 

A la vente du château, en 1936, le mobilier réuni est si riche qu'un catalogue est imprimé pour préparer la vente aux enchères de ces objets.

 

Cliquer sur la photo ci-dessous pour télécharger et lire le catalogue au format pdf.

Chateau des Avenières, catalogue de vente du mobilier

Les pages manquantes du catalogue sont des pages vides

 

A l'extérieur du château le blason des Shillito est répété deux fois dans la pierre sur le mur extérieur nord-ouest du batiment. Il couronne également le cache de la cloche extérieure qui servait de sonnette aux arrivants, sur le mur sud-ouest, où se termine le chemin d'arrivée. Le visiteur est ainsi averti qu'il arrive chez les "Wallace Shillito".

 

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Le cygne au fer à cheval de la famille Walace Shillito couronne fiérement la cloche, comme un titre de propriété. Noter la hampe métallique à l'extrémité des balcons en fer forgé, porte-vase permettant de fleurir les balcons. A remarquer également le mur en pierre surmontée d'une assise en briques alternées de poutres en bois, technique bourguignonne ou normande, mais pas savoyarde.

 

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