A Bourges la prospère cité marchande devient un centre
intellectuel grace à la fondation d’une université par le frère de Louis XI en
1463. La famille Lallemant fournit des draps à la cour vers 1455-1460. Elle est anoblie
en 1482. Cette époque marque l’apogée de la cité berrichonne. La famille Lallemant
est un des quatre grands mécènes de Bourges.
En 1487 la Roue de Fortune tourne : un terrible incendie ravage
les deux-tiers de la ville ! De ce chaos surgit l’actuel hôtel Lallemant.
L’ancienne maison est intégralement détruite par le feu.
Jean Lallemant, receveur général de Normandie à la suite de son
père Guillaume en 1481, "entreprend la reconstitution de sa demeure privée, en
rachetant l’emplacement des maisons brûlées à côté de la sienne, sur le mur
d’enceinte gallo-romaine ... et en fit une demeure à l’usage d’habitation
et de fonction plus digne de sa fortune et de son rang. La construction entreprise aux
alentours de 1490 était loin d’être terminée à sa mort en 1494. Ses deux fils
prénommés l’un et l’autre Jean parachèvent l’édifice vers
1515-1518."(1)
Jean Lallemant, père, est receveur général de Normandie. Marié
à Marie Petit, ils ont deux garçons, nommés chacun Jean. Pour les distinguer l'un est
appellé Jean l'aîné, l'autre Jean le jeune. Le père décède le 28 juin 1494.
Le fils aîné devient également receveur général de Normandie.
En 1500 il est maire de Bourges. Il décède le 29 juin 1533.

Voir caisson de "la grenade
ignée"
Le fils cadet, Jean le jeune, est receveur général du Languedoc.
Il devient maire de Bourges en 1510. Il est amené à surveiller la construction
d'écluses avec porte à sas, entre Bourges et Vierzon, procédé inventé par Léonard de
Vinci et réalisé par les "ingénieulx de Milan", ses élèves. Le projet
grandiose de relier la Loire au Rhône ne fut jamais achevé. Il se marie avec Jeanne
Champanges. Condamné en 1535 à une amende de 26000 livres tournois pour fraude
monétaire, il est emprisonné à Paris à la conciergerie du palais du roi. Il est
rapidement libéré, solutionnant ce sombre épisode avec une meilleure fortune que son
illustre prédécesseur berrichon, Jacques Coeur, argentier de Charles VII.
Les trois Jean Lallemant sont chevaliers de l'ordre de Notre-Dame
de la Table-Ronde de Bourges, comme le note Fulcanelli.
Cet ordre (2), fondé en 1486
par un marchand lyonnais, Jean de Cucharmois, n'est apparemment pas un ordre ésotérique
à la recherche de la Pierre Philosophale. Ce cercle de 15 membres, agrandi à 24, est
réservé aux bourgeois de la ville qui s'y entraident et se soutiennent. Cet ordre est
plus un "Rotary Club", si l'on devait le comparer à une structure moderne
équivalente. Cette chevalerie roturière dure de 1486 à 1510, voire 1533 selon le
manuscrit Harley 5301 conservé à la British Library (voir page suivante)
"Le 8 mai 1490 Jean Cucharmois part de Bourges visiter le
Saint Sépulcre. Durant son absence Jean Lallemant l'aîné prend la tête de l'ordre. En
1492 Jean Lallemant le jeune est reçu chevalier. Il reçoit le chapelet composé de cinq
dizaines dont les Pater étaient d'or et les Ave de corail, enfilés en lacs de soie
verte" explique René Alleau dans un article intitulé "Commentaires sur le
livre d'heures de Jehan Lallemant", publié dans la revue "La tour
Saint Jacques" n°1 de décembre 1955.

Livre d'heures de Jean Lallemant, l'aîné
Les frères Lallemant sont des érudits et des mécènes.
Ils commandent auprès des enlumineurs de Bourges plusieurs livres, dont des livres non
religieux.
Une liste de onze livres enluminés leur ayant appartenu a pu
être établi par des érudits(3). Ils sont actuellement conservés dans des
bibliothèques disséminées dans le monde :
- Virgile, manuscrit 493, bibliothèque de Dijon
- Boëce, « Consolation philosophique », Paris, manuscrit 6643, Bibliothèque
Nationale de France
- « Roman de la rose », Saint Petersbourg, musée de l'Ermitage, Stieglitz,
rèf 14045
- Livre d’heure, usage de Bourges, Ambroise, Firmin-Didot, séparé en 4 parties :
1 Calendrier, collection Rohan Chabot, Paris
2 premier tiers, collection Firmin-Disot, disparue en 1942
3 deuxième tiers, Londres, British museum Ad 39641
4 troisième tiers, USA Baltimore, Ricci 361, Walters art gallery 459
- Livre d’heure, usage de Bourges, Koninklijke bibliotek, en Hollande
- Livre d’heure, usage de Bourges, Philadelphie, USA, bibliothèque publique, Lewis
87
- Livre d’heure, usage de Bourges, Washington, bibliothèque du Congrès, collection
Rosenwald
- Livre d’heure, avec la devise « delear prius » , Ricci 335, Baltimore, USA,
- Livre d’heure, avec la devise « delear prius », sans armoiries, Ricci 341,
Baltimore, USA,
- Antiquités judaïques de Joseph, Paris Bibliothèque de l’Arsenal, rèf 3686
- Livre d’heure, parisien du XVIe, USA, New York, bibliothèque Pierpont Morgan

Livre d'heures de Jean Lallemant le jeune,
Koninklijke bibliothek
Nous reviendrons sur quelques uns de ces manuscrits à l'occasion
de certains caissons.
Cliquer ici pour accéder aux trente
caissons de la chapelle
(1) Madame F. Pruner, ancienne conservateur aux Musées de
Bourges, " Hôtel Lallemant, Musée d’arts décoratifs ", p.1.
1982.
(2) In Paul Chenu, page 60 : Manuscrit de la
bibliothèque de Carpentras, côte 1793, « L’ordre des chevaliers de N-D de la
table ronde de Bourges » où le blason de Lallemant fils aîné est inscrit. Ce
blason figure sur chapelle des Lallemant à l’église St Bonnet, à Bourges.
(3) - Paul Chenu "Manuscrits aux armes des Lallemant"
in "Mémoire de l'union des sociétés savantes de Bourges 1951-1952", 3eme
volume, 1953. - M. Gauchery "Le livre d'heures de Jehan Lallemant le jeune, p.313 -
Koninklijke Bibliothek - René Alleau "commentaires sur le livre d'heures de Jehan
Lallemant, seigneur de Marmagne" p.32.
Remerciement appuyé à Mme Brigitte Stiévenard, attachée de
conservation honoraire, qui a fourni aimablement toute cette documentation et références
bibliographiques.
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