Tarot des Avenières, la Force

 

Sur cette onzième lame du tarot une femme pose sa main droite sur le front d'un lion et lui maintient la machoire inférieure ouverte de sa main gauche. C'est un véritable tour de force. Qui est-elle ?

Une source coule du creux d'un rocher. Un serpent s'enroule le long du tronc de l'arbre placé devant, sa queue épousant le dessus de la roche et prenant sa couleur grise. Le ruisseau s'écoule, passant contre le lion et sa domptrice, et se jette dans une mer qui prend par reflet la couleur du volcan en iruption. Ce volcan se retrouve sur la lame de l'Ermite.

L'arbre et le volcan ont une forme similaire. Les feuilles ou la fumée forment un panache, posé sur le tronc ou la montagne. L'arbre n'est-il pas une flamme végétale, froide et lente, et le volcan un arbre de feu, chaud et violent ? N'y a-t-il pas similitude de forme ? Prenez le temps de vous y arrêter.

 

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Regardons le visage de cette jeune femme. Nous le retrouverons peut-être ailleurs. Un chapeau à large bord recouvre sa tête, traçant le huit solaire, identique au huit placé au dessus de la tête du Bateleur. Cette femme est-elle l'âme du monde ? Elle dompte le lion à l'oeil de braise, sachant gouverner les forces de la nature les plus sauvages par la douceur et l'harmonie.

 

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Comme sur d'autres lames de la chapelle, l'oeil de l'animal est rehaussé par trois taisselles rouges, donnant une intensité accrue au regard.

 

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L'arbre et le volcan sont en vis-à-vis de part et d'autre de la jeune femme. Au pied de l'arbre d'une roche jaillit une source.

En alchimie c'est un image forte du chercheur qui a reconnu la voie à suivre.

L'alchimiste Fulcanelli écrit, citant l'Exode, XVII, 6 : "Sur le conseil de l’Eternel, Moïse, par trois fois, frappa de sa verge le rocher Horeb, et une source d’eau vive jaillit de la pierre aride".

Cette scène est complétée par l'arbre posé devant la roche ouverte car fendue. Un serpent s'enroule sur l'arbre. Dans le récit biblique Eve est tentée par le serpent, enroulé sur l'arbre de la Connaissance du bien et du mal. Il lui en offre le fruit défendu.

Si la source jaillissant d'une roche aride est une figure de la voie en alchimie, cette même source jaillit également du pied d'un vieux chêne creux. Fulcanelli commente, ainsi : "L’artiste a cheminé longtemps; il a erré par les voies fausses et les chemins douteux, mais sa joie éclate enfin ! Le ruisseau d’eau vive coule à ses pieds. Il sourd, en bouillonnant, du vieux chêne creux. Notre Adepte a frappé le but. Aussi, dédaignant l’arc et les flèches avec lesquelles, à l’instar de Cadmus, il transperça la dragon, il regarde ondoyer la source limpide dont la vertu dissolvante et l’essence volatile lui sont attestées par un oiseau perché sur l’arbre".

 

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La source jaillit du rocher frappé par la verge de Moïse et de l'arbre

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La source jaillit du rocher frappé par la verge de Moïse et de l'arbre, à Notre-Dame de Paris. A droite, Eve, ne faisant qu'un avec le serpent, donne le fruit à Adam, dans la première figure du livre le "Typus Mundi", dont parle Fulcanelli.

 

A droite de la femme se tient un volcan en éruption, crachant flammes et fumée. La femme au lion n'en éprouve pas la moindre inquiétude. Que représente ce volcan ? Comme l'arbre vert, cet arbre de feu, ajouté par A. Dina, ne figure pas dans le tarot d'Oswald Wirth.

L'arbe de gauche donne l'eau vive. Le volcan de droite donne-t-il à cette eau la couleur du feu, une qualité ignée, comme suggéré par le reflet du volcan dans l'eau ? A. Dina veut-il ici signaler un arcane à l'attention des alchimistes, volcan que l'on retrouve sur la lame de l'Ermite ?

 

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Le volcan, arbre de feu.

Cette femme au chapeau céleste, personnification d'un aspect de l'âme du monde, est en vis-à-vis de la lame de tarot où se tient le Monde en gloire, là encore l'âme du monde. Celle-là est personnifiée sous les traits d'une femme dévêtue, entourée d'une mandorle de laurier et des quatre animaux de la vision d'Ezechiel, des évangélistes.

Ces deux femmes n'en serait qu'une, sous deux aspects différents. Leur importance est soulignée par la grande surface qu'elles occupent. Elles sont placées en hauteur, avec le Soleil, la Lune, les Etoiles et le Diable.

Le Monde et la Force incarnent les archétypes de la création. La première paraît s'adresser au macrocosme, tandis que la Force relèverait du petit monde, le microcosme.

 

Enfin, au bas et au centre de cette lame, la figure géométrique énigmatique est constituée de trois triangles empilés verticalement. Sous celui du feu est placé un triangle d'eau, puis, encore dessous, un autre triangle de feu surmontant un petit carré. Il est donc question dans cette lame de tarot d'unir du feu et de l'eau, comme  dans la lame précédente, la la Roue de Fortune, où la même figure se trouve déja au pied de la lame.

 

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Figures géométrique identiques, lame 10 à gauche, lame 11, la Force, à droite.

 

L'ensemble de ces figures, composant les XXII lames du tarot, constitue peut-être un message ou une grille de lecture propre à A. Dina, concepteur de ce jeu de tarot revisité. La solution de l'éngime, la compréhension de cet ensemble, est aujourd'hui perdue.

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Ci-dessous, en référence, la lame du tarot de Marseille redessinée et peinte par Oswald Wirth (1860-1943), en 1889, pour son maître Stanislas de Guaita (1861-1897).

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Tarot de Wirth, 1889. Copyright © the Golden Dawn Research Trust, 2008

 

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